Blain, pendant la Seconde guerre mondiale
Blain, pendant la Seconde guerre mondiale © RADdo

Dans chaque magazine, vos témoignages. Cette fois, vous vous souvenez de la Poche de Saint-Nazaire, à lire et à écouter

En 1944, alors que les armées alliées libèrent la France de l'occupation nazie, des troupes allemandes se replient autour de Saint-Nazaire et prennent en otage quelque 130 000 habitantes et habitants, jusqu'à la fin de la guerre. C'est ce qu'on appelle la Poche de Saint-Nazaire. Dans le magazine Loire-Atlantique de janvier 2023, nous avons lancé un appel à témoignage pour raconter cette période si particulière. Nous avons reçu de très nombreuses contributions que nous vous restituons ici, en complément des témoignages parus dans le magazine de mars 2023.

La Poche : quelques repères historiques

  • Août 1944 : Après le Débarquement des Alliés en Normandie, l'Ouest de la France est rapidement libéré de l'occupation nazie, sauf quelques Poches de résistance allemande.
  • Octobre 1944 : des femmes et des enfants sont autorisé·es à quitter la Poche, pour des raisons humanitaires mais aussi pour limiter le nombre de personnes à nourrir.
  • 11 mai 1945 : soit trois jours après l'Armistice qui marque la fin de la guerre, la Poche est libérée.

130 000 civils en otage dans tout l'Ouest de la Loire-Atlantique

La Poche de Saint-Nazaire est centrée autour du port nazairien mais s'étend jusqu'à Blain et Cordemais, Elle inclut même des villes du Pays de Retz au Sud de la Loire. 28 000 soldats allemands défendaient la Poche, 130 000 civils ont été pris en otage pendant neuf longs mois.

Mémoire des enfants de la Poche, aujourd'hui nonagénaires

Les témoins de la Poche ont vieilli. Pour la plupart enfants pendant la Guerre, elles et ils ont conservé des souvenirs marquants de cette période. Les souvenirs de la Poche et de l'Occupation, deux périodes de deuil, de souffrances, de privations, sont parfois flous, entrelacés, émouvants. Et le retour de la guerre en Europe avec le conflit en Ukraine a réveillé la mémoire de celles et ceux qui étaient alors des enfants, pour beaucoup nonagénaires aujourd'hui. Voici quelques extraits des courriers que nous avons reçus :

Madame P, 91 ans, habitante de Carquefou

Je vivais à Nantes quartier Doulon mais nous nous étions réfugiées à Malville chez ma grand-mère paternelle avec ma mère. Mon père était prisonnier en Poménarie. Il n'y avait pas d'eau (un puit à 400 m), pas d'électricité et juste une cheminée pour faire les repas et se chauffer !! Lorsque la poche s'est formée, nous étions coupés du monde et il n'y avait plus aucun ravitaillement, rien ne passait le front !! Très vite les écoles ont fermé. Les ennemis s'affrontaient sans arrêt. La ligne frontière était minée. Il y avait des tranchées partout dans les champs. Les tirs étaient de plus en plus rapprochés, la nuit, le jour. Les obus éclataient un peu partout et nous avons une amie de 20 ans qui a été tuée sur le pas de sa porte. Nous ne trouvions plus rien. Nous allions dans les fermes pour nous ravitailler. Les fermiers nous vendaient quelques produits mais les Allemands étaient comme nous, car l'armée ne les approvionnait plus donc, eux, ils volaient. La vie devenait insoutenable, dangereuse et nous avions peur. Les occupants devenaient agressifs. Ils s'installaient dans les maisons délaissées. Ils y trouvaient du vin, des alcools et éatient souvent avinés. Ils jouaient avec leurs armes pour effrayer. Ils mettaient souvent la population en joue !! C'est à ce moment-là que les autorités ont décidé d'organiser des convois de la Croix rouge pour aider la population à sortir de ce carcan. Il y en a eu 3, je crois. Ma mère a donc décidé de tout abandonner et de nous rapatrier à Nantes vers le mois de mars 1945 afin que je puisse reprendre l'école... Pour prendre le convoi de la Croix rouge, il fallait aller à Savenay, 9 km à pied. Nous avons dû nous y rendre par un tès grand froid et avec une grand-mère de 80 ans !! Mais enfin, nous avons retrouvé le calme à Nantes.

Serge, 90 ans, habitant de Saint-Nazaire

En 1944, nous étions réfugiés à Sainte-Anne-de Campbon, et notre famille décide de déménager à La Baule-les-Pins. C'est là que nous avons vécu la Poche, ma mère, mes deux soeurs et moi.... Malgré les Allemands, nous avions un sentiment de "liberté", même si pour aller sur le remblai voir la mer, il y avait des murs (de l'Atlantique) qui barraient les rues... Les Allemands étaient très présents, beaucoup avaient entre 40 et 60 ans, des vieux pour nous. Ils étaient plutôt bon enfant et n'avaient qu'une envie, rester en vie. Ils obéissaient aux ordres mais pensaient à nous. Quand ils coupaient des arbres pour faire des abris, ils ne se baissaient pas et coupaient à 1.5 m du sol, ce qui nous laissait du bois pour nous chauffer.

Je peux vous dire que j'ai crevé de faim. Au marché de La Baule, il fallait faire la queue durant des heures, à partir de deux ou trois heures du matin, pour être servis. Je rends hommage à mes parents pour nous avoir nourri durant ces années difficiles...

La Poche, c'est aussi la Libération. le 8 mai 1945, la guerre était finie mais les Allemands étaient toujours là. Avec mes cousins, nous les harcelions avec des mottes de terre, lorsqu'ils passaient sur les routes. Un Allemand avait recçu une motte, s'était énervé et avait sorti son revolver. Son camarade l'a calmé, nous avons pu fuir dans les dunes.

Des photos envoyés par Serge sur la Poche de Saint-Nazaire
Des photos envoyés par Serge sur la Poche de Saint-Nazaire © DR

Thérèse, 81 ans, habitante du Cellier

"Mon petit récit n'a peut être pas beaucoup d'importance mais pour moi, ce souvenir revit avec la guerre d'Ukraine. J'avais 3 ans lors de la Poche de Saint-Nazaire. J'ai surtout des souvenirs visuels comme ce trou d'obus tombé sur la maison de ma grand-mère à Saint-Brevin ou la vision de Saint-Nazaire sous des monceaux de pierres des maisons bombardées. Des Allemands logeaient dans le Blockhaus juste à côté de ma maison. J'étais petite mais je sentais la peur de mes parents, qui ont décidé de déménager chez mes grands-parents. Je me revois manger une tartine de pain, fait par mon grand-père, avec du beurre, barraté par ma grand mère. "

Souvenirs à écouter

Nous avons également pu enregistrer les souvenirs de certaines des personnes qui nous ont contactés. Mauricette et Jacqueline tout d'abord, qui se sont rencontrées à Malville en 1944 et sont toujours amies. Elles vivent à Saint-Nazaire. Nous avons également rencontré des résidentes de l'EHPAD Suzanne-Flon à Saint-Nazaire,

Mauricette et Jacqueline, à Malville

"Réfugiée et empochée"

Ecoutons les souvenirs de Louise, Yvonne, Anne et de deux Jacqueline.

La faim et le froid, les vélos réquisitionnés

S'informer en tenps de guerre

Les relations avec les Allemands

Le sauvetage d'un homme blessé

Les martyrs du maquis de Saffré

Radio pédale à La Chapelle-des-Marais

Une habitante nous a transmis les souvenirs de son père décédé, participant de Radio pédale, radio pirate alimentée par l'énergie des dynamos de vélos. Voici le document :

Radio pédale PDF - 10,63 Mo

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