Pont-Château, laboratoire de la lutte contre le chômage de longue durée

Valérie et Brice sont privés d'emploi depuis longtemps. Mais ils sont actifs pour trouver un travail
Valérie et Brice s'impliquent dans le Territoire zéro chômeur de longue durée à Pont-Château © Paul Pascal / Département de Loire-Atlantique

La commune de Pont-Château veut devenir un Territoire zéro chômeur de longue durée. Grâce à un travail préparatoire de plus de trois ans, elle sera prête, si elle est retenue, à accueillir une entreprise spéciale, qui proposera des emplois adaptés à une centaine de personnes qui en sont privées.

Et si la solution contre le chômage de longue durée se jouait à Pont-Château ? Depuis plusieurs années, la Ville, le Département et de nombreux acteurs locaux y croient : quand la loi sera définitivement votée, Pont-Château a bon espoir d’être choisie pour devenir Territoire zéro chômeur de longue durée. Cette expérimentation se fonde sur trois constats pour supprimer le chômage de longue durée à l’échelle d’un territoire : premièrement, personne n’est inemployable. Ensuite, ce n’est pas le travail qui manque, mais c’est l’emploi, puisque de nombreux besoins de la société ne sont pas satisfaits. Enfin, ce n’est pas l’argent qui manque, puisque le chômage de longue durée entraîne de nombreuses dépenses et manques à gagner que la collectivité prend à sa charge.

Le besoin d'être utile

Concrètement, une entreprise à but d’emploi sera créée à Pont-Château. Cela fait plus de trois ans que la maire, Danielle Cornet, a lancé la réflexion sur ce projet. Stéphane Delalande, Pontchâtelain, attend cela avec impatience :

Nous avons été un peu découragés par le décalage entre notre envie de travailler et le temps nécessaire pour mettre en place cette nouvelle solution pour nous. Quand on est coupé du monde du travail, on n’a plus l’impression d’exister. J’étais peintre en bâtiment, mais de gros soucis de santé m’empêchent de récupérer suffisamment de force pour continuer d’exercer ce métier. Ce qui me manque, c’est le contact avec les gens. Quand je travaillerai pour cette nouvelle entreprise, je pourrai de nouveau avoir le sentiment d’être utile.

Son profil ressemble à celui des personnes privées d’emploi identifiées sur Pont-Château. La ville comptait 398 demandeurs ou demandeuses d’emploi de longue durée au 30 juin 2020, soit 45 % du nombre de personnes au chômage de la commune. 24 % de ces personnes durablement privées d’emploi ont une expérience professionnelle dans le service à la personne et en collectivité, et 20 % dans l’industrie.

Une centaine d'embauches en CDI

Dès le lancement de l’entreprise à but d’emploi, nous estimons que 50 à 75 salarié·es seraient embauché·es en CDI, à temps partiel ou temps plein, selon leurs choix ou leurs possibilités et que, sur cinq ans, 120 personnes seraient concernées,

détaille Vincent Lépinay, chargé de la mise en place de l’entreprise à but d’emploi.

Des services utiles pour toute la population

Cette entreprise à but d’emploi est très particulière. Financée au départ par des fonds publics, elle doit développer des activités qui lui assureront des revenus.

Mais ces prestations et ces services doivent répondre à des besoins non satisfaits et ne pas apporter de concurrence à des structures locales déjà présentes à Pont-Château,

rappelle Pauline Bommé, chargée de mission pour le projet à Pont-Château. Tout le travail de préparation pendant ces deux années a servi à établir un inventaire de ces activités très concrètes : une matériauthèque pour récupérer et réutiliser des matériaux de toutes sortes, une épicerie ambulante, la collecte de déchets verts chez les habitant·es, le nettoyage de l’intérieur de véhicules, mais aussi des services à la personne, comme une aide pour fermer les volets des personnes âgées ou en situation de handicap, le débouchage d’un syphon…

"L'espoir que cela peut changer"

De véritables services à la population, imaginés et proposés par la cinquantaine de personnes privées d’emploi, qui se chargeront de les mettre en oeuvre. « Nous avons mis toutes nos compétences ensemble, sans jugement, ni a priori sur les parcours et les difficultés. L’important, c’est d’adapter l’emploi à nos compétences et non l’inverse », souligne Valérie Le Solliec, une habitante sans emploi durable, qui a activement participé à la concertation. Compétente, elle l’est, mais elle ne peut pas l’exprimer dans le monde trop normé du travail : diplômée et travaillant en entreprise, elle a brutalement perdu une grande partie de sa vision, ce qui ne lui permet plus de conduire la nuit, de lire des petits caractères…

J’ai frappé à toutes les portes et épuisé toutes les solutions d’insertion professionnelle, mais je ne rentre dans aucune case. Le milieu du travail m’est interdit, parce que je cumule âge et handicap, qui sont de vraies discriminations.

Stéphane Delalande poursuit :

D’une manière générale, on gaspille trop dans notre société. On jette des objets qui peuvent être réparés ou recyclés. On met aussi sur le côté des personnes qui ne rentrent pas dans les cases, mais qui ont pourtant des envies et des compétences. Cette expérimentation de lutte contre le chômage m’apporte l’espoir que cela peut changer.

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