La cheminée de Rochebrune

La cheminée de Rochebrune
© P Pascal

Déménagée d'un étage dans le cadre de la rénovation en cours, "la cheminée Rochebrune" a dû être démontée puis remontée. Un travail minutieux d'experts, tailleurs de pierre et plâtriers, pour lui faire retrouver la place exigée par Raoul de Rochebrune, auteur, en 1924, d'un legs de plus de 1 000 armes au musée Dobrée.

Un legs exigeant

Sans attrait particulier par rapport aux autres cheminées du palais Dobrée, celle de la grande salle du rez-de-chaussée devient à compter de 1930 "La cheminée Rochebrune". C'est en effet à cette date que le musée Dobrée aménage la salle qui va accueillir les 1 000 armes de collection léguées par le comte Raoul de Rochebrune, selon des exigences bien précises…


Je fais ce legs à condition que ma collection soit réunie en entier dans la grande salle du bas du musée Dobrée où se trouve l’épée Ingelrel et l’étrier carolingien plaqué d’or semblable au mien. Cet étrier devra être réuni au mien, car il forme paire avec lui, dans la même collection et la même vitrine. Mes armes devront être exposées dans des vitrines tendues de peluche ou de velours rouge. Une plaque de marbre de 1 mètre de long devra être scellée sur l’un des murs de cette salle et portera l’inscription suivante en lettres majuscules : ARMES ET OBJETS DONNES PAR LE COMTE RAOUL DE ROCHEBRUNE
Mon médaillon en bronze exécuté par Robuchon et que je donne également au musée sera placé au dessus de la plaque de marbre et les armoiries de la famille de Rochebrune seront sculptées sur la cheminée de cette salle. Ces charges et conditions sont au frais du Musée Départemental ; et si elles n’étaient pas exécutées, j’annule le présent legs. Mes héritiers auront le droit d’y veiller.

Lorsqu’il meurt en août 1924, sa femme conserve l’usufruit de la collection jusqu’en 1929. Les collections intègrent le musée Dobrée début 1930 et de février à mai, la salle Rochebrune est aménagée selon les clauses du legs. Le nouveau parcours muséographique prévoyant le déplacement de la collection d'armes Rochebrune au 1er étage du palais rénové, la cheminée a dû suivre pour respecter les conditions du comte.

Travail de spécialistes sur la cheminée

Les travaux sur la cheminée ont eu lieu au début de ce printemps. L’entreprise qui a démonté la cheminée n’est pas celle qui l’a remontée, ni même celle qui l’a montée à l’étage ; il a été fait appel à des manutentionnaires spécialisés.

Sans archives connues, la dépose a démarré par un aérogommage à l’abrasif de silice très fin pour découvrir les joints sous la couche du badigeon de chaux.

Les pièces ont ensuite été démontées une à une depuis le fronton jusqu'au pilastre, avec la découpe des brochages d’acier. Après un inventaire, les pièces ont été stockées puis transportées avec soin.

Remontage

C'est l’entreprise Bonnel Loire Océan de Loire Atlantique qui est intervenue. Sa spécialité est la taille de pierre en général. Le responsable des opérations est compagnon du devoir.

Au montage, les opérations ont suivi l’ordre suivant :

  • Création d’une structure porteuse masquée derrière les contre-cloisons de la salle (maçonneries pleines dissimulées derrière les plaques de plâtres) ;
  • Dressage des pilastres granit à l’entraxe identique en laissant les futurs épaulements pour la réalisation des contre cœurs en tuileaux (trompe l’œil) ;
  • Mise en œuvre des chapiteaux sculptés en pierre calcaire ;
  • Mise en œuvre du linteau et des corbeaux puis assemblage (début de l'entablement)

  • Pose du fronton et du couronnement ;
  • Dressage du fronton ;
  • Badigeon de chaux aérienne à l'identhique et mise en place d’une dalle de foyer en granite.

Une fois les différents éléments prêts, le temps de montage a été d’une semaine de travail intensif pour deux compagnons très expérimentés.

La réussite de cette opération est une fierté pour les équipes en charge des bâtiments patrimoniaux.

A Lecot, conducteur de travaux

La cheminée dans les deux versions de la salle de Rochebrune

  • La salle de Rochebrune en 2011
    La salle de Rochebrune en 2011
  • Esquisse de la future salle Rochebrune 2024
    Esquisse de la future salle Rochebrune 2024 © Studio Adeline Rispal

Une collection pléthorique et variée

Né en 1848, Raoul de Rochebrune consacre sa vie à enrichir la collection d’objets d’art et d’archéologie dont il hérite de son père, Octave de Rochebrune (1824-1900). Tous deux partagent la passion des armes et des objets d’art. Raoul enrichit sa collection en suivant « les traditions de son père ». S’il s’en éloigne parfois, c’est contraint par le marché ou mené par sa curiosité personnelle.

1 000 armes de collection

Il lègue près de 1 000 armes au musée Dobrée. Cet ensemble est la partie la plus prestigieuse de la collection familiale. Dès les années 1900, elle est connue de nombreux érudits, Raoul de Rochebrune entretenant un vaste réseau de collectionneurs et de marchands d’art dans toute la France.
Il étudie, décrit, photographie, publie et conçoit aussi personnellement la présentation des pièces de sa collection. Il s’inscrit en cela dans le sillage de son père : Octave, graveur doué et reconnu, a ainsi représenté 400 armes de son propre fonds.

Les armes de provenance locale

Dans l’esprit de leur temps, Octave et son fils manifestent un grand intérêt pour l’histoire et l’archéologie locales. Raoul de Rochebrune est constamment en contact avec des pêcheurs et des antiquaires de Vendée et de la basse vallée de la Loire, qui lui permettent de collecter de nombreuses armes anciennes dans les cours d’eau et les terres de ces régions.

Les armes de Haute Époque

C’est la part la plus importante de la collection Rochebrune. Couvrant une période de l’Antiquité romaine au début de la période moderne (vers 1600), elle est majoritairement constituée d’épées, de dagues et de pièces d’armures. Elle propose aussi un ensemble considérable, à l’échelle de la France, de plaques et pendants émaillés du Moyen Âge.

Les armes étrangères

Alors que le développement du marché des armes anciennes entraîne leur raréfaction et l’augmentation de leur coût, Raoul de Rochebrune s’en détourne et choisit d’acheter des armes plus récentes et moins chères, notamment des armes étrangères. Sa collection se concentre autour du Moyen-Orient et de l’Inde, mais comprend aussi des pièces d’Extrême Orient et d’Afrique du Nord.

Les armes modernes et contemporaines

Les Rochebrune collectionnent les armes européennes des 18e et 19e siècles : cette partie de leur collection, de qualité très disparate, se compose de pistolets et d’épées, dont certains leur sont contemporains. Quelques pièces témoignent également de l’intérêt de Raoul pour la chasse.
Ce type de collections s’avère moins prestigieux et moins prisé que les armes des périodes plus anciennes.

En savoir plus sur le futur musée Dobrée

Consultez la rubrique du projet

Cette page vous a-t-elle été utile ?